À travers ses sculptures, l'artiste québécois Bernard Hamel laisse parler la matière, ouvrant une fenêtre sur l'âme du temps.
Souvenirs et faux souvenirs, pour une matière narrative.
Ma démarche sculpturale repose essentiellement sur une relation directe à la matière. Elle est, dans une conception matérialiste du monde, notre premier rapport à l’autre, à l’extérieur et par effet de miroir, à nous. La matière dirige mes gestes, détermine mes choix et les outils me permettent, avec leur singularité, de modeler ces formes. C’est également à son contact, lors de recherches et d’explorations, que l’histoire se forme, que les souvenirs ressurgissent et nourrissent la narrativité de mes œuvres, leurs discours. Une forme en inspire une autre pour créer des ensembles, des séries, qui définissent par conséquent, ma démarche comme étant un processus de création continue.
Mes sculptures sont imprégnées de traces laissées par le passage de vies, inspirées d’éléments naturels ou encore d’objets réels transformés. Les souvenirs rencontrent la matière pour se muer en une forme sculpturale dont les lignes organiques reviennent de manière récurrente.
Entre histoire et fiction, mes sculptures jouent sur la potentielle véracité des références et des traces qu’elles aussi portent symboles du passage du temps et d’un morceau d’histoire. Vestiges ou fragments historiques, elles sèment une certaine ambiguïté sur leur nature et deviennent d’étranges artéfacts archéologiques parfois anachroniques ou décalés, voire incongrus et ironiques. Les œuvres parlent d’un milieu inconnu, d’une époque indéterminée, d’une intériorité au demeurant inaccessible.
L’intériorité est un concept qui m’intéresse et que j’essaie d’exploiter dans chacune de mes sculptures. Qu’est ce qu’elles contiennent? Qu’est-ce qu’elles cachent ou retiennent et qu’est-ce que les indices laissés à la surface en révèlent-ils?
Ces traces de récits, de narrations ouvertes, d’hypothèses et d’histoires convoquent l’imagination du spectateur pour participer à la reconstitution d’une idée. Dans cette volonté de laisser au spectateur le soin de composer sa propre histoire, mes expositions présentent des pièces qui agissent les unes avec les autres comme des fragments qui, disposés avec soin dans l’espace, créent des ensembles poétiques et sensibles tout en restant dans la suggestion et les nuances.
Davantage que de lutter contre l’oubli, mes œuvres sont le rappel de la liberté de l’imagination qui exploite le temps et la matière comme support.
BIOGRAPHIE
Originaire de Québec, Bernard Hamel vit et travaille dans son atelier à St-Roch des Aulnaies. Après avoir été pendant 12 ans à St-François de l’Ile d’Orléans. Il termine en 1992 un baccalauréat en arts plastiques à l’UQAM en concentration sculpture où il expérimente différents matériaux comme le bois, la pierre, le métal et la céramique. Un peu plus tard, il décide de parfaire ses connaissances du bois en accomplissant un DEC en ébénisterie à l’Institut québécois d’ébénisterie, à Québec.
En 2005, il exécute un stage de tournage sur bois avec Jean-François Escoulen et André Martel, deux tourneurs de réputation internationale. Depuis, il multiplie les expositions individuelles (‘’Montre-moi ce que tu as en dedans ‘’ à Nivu NiCornu, ‘’Rivage‘’Centre Paul-Médéric et Galerie du Trait-Carré.Québec) et collectives (Magister , à Québec) ainsi que de nombreuses participations à des symposiums à l’international dont le Festival de sculpture Camille Claudel, à LaBresse, France , et Festival Montagn’Art, à Thyon , Suisse.
Sa carrière de professeur (depuis 1999 à la Maison des Métiers d’Art de Québec), à l’instar des symposiums, est une profonde implication dans son milieu et participe à cette volonté de partager et de transmettre des savoirs auprès de divers publics.
Depuis 2017, le travail de Bernard Hamel prend de nouvelles orientations ancrées sur de nouvelles expérimentations, toujours en lien avec la matière, mais bien plus concernées par les matériaux in situ.